Epicurieux/ Outch/ Où sont passées mes chaussures/ des textes et des détails

Epicurieux, c'est fini!
Pour voir le début du travail, c'est.
Alors je complète en virtuel l'exposition organisée par Outch avec Elodie Paupe.





Mot de Lucile Nabonnand pour l'exposition Où sont passées mes chaussures?

Dans le cadre du festival Epicurieux, festival qui fait la part belle à l'innovation sous toutes ses formes, je voulais proposer une vision un peu plus pessimiste de l'évolution technologique et culturelle de nos sociétés. 
Partant d'un livre, Carla et la pénombre de Somoza, thriller dystopique où l'art est devenu hyperdramatique, et l'humain vivant le matériel du tableau, j'ai proposé cette série d'hommes et de femmes qui peuvent être vus comme oeuvre d'art et comme objet : posés sur les trépieds comme des statues, gardés dans des bocaux pour leur beauté... posés ou utiles, en tout cas toujours empêchés de quitter le cadre car il leur manque à tous quelque chose. 
Ils représentent une dérive possible du système capitaliste. Les évolutions techniques et technologiques ne libèrent pas nécessairement l'humain. Que restera-t-il à vendre lorsque sa force de travail et son intelligence ne seront plus nécessaires, à part son corps, sa chair, sa présence ?
L'art a, depuis les années 70, déjà usé des corps dans des performances qui utilisent son sang, ses muscles, ses fluides comme matériau. L'idée d'un art complètement performatif qui pourrait s'acheter, se vendre de manière pérenne n'est pas très loin. 
La série est construite en une narration chronologique et ce sont les modèles qui parlent eux-mêmes du sentiment d’un hypothétique spectateur face à une évolution vers l'art humain : du désir d'innovation et ses conséquences à la déception, jusqu'à l'effacement. Elle parle de l'humain, de son attrait pour la nouveauté et de sa très grande capacité à l'intégrer, l'ingérer et le délaisser. Dans le culte de l'urgence, même culturelle, l'instant d'une nouveauté ne s'appréhende plus qu'en temps réel.
Cette série se lit aussi comme des hommes-objets. Dans un monde de marchandisation de l'art,  celui-ci a toujours eu cette double place, art et objet. Ces corps peuvent être les émanations des objets auxquels ils sont accolés. La multiplication des objets connectés, intelligent donnent naissance à un nouveau paradigme. Lorsque nous pourrons parler avec notre frigo, nos toilettes, les trouverons-nous sympathiques, un brin peureux, ironiques ou précieux ? La capacité de l'homme à toujours chercher des ressemblances avec ses propres émotions nous conduira-t-elle à avoir des comportements anthropomorphiques avec nos objets quotidiens, à imaginer qui se cache derrière une voix, à donner des visages et des identités à nos téléphones, voitures et tabourets ?



Mot d'Elodie Paupe

A la lumière des explications conceptuelles de Lucile, il m'advient de dire que j'ai d'abord vu cette collaboration comme un moment d'intuition. J'ai eu envie de travailler la matière bois en jouant avec ses hauteurs et ses formes. Il me semblait intéressant de confronter la matérialité brute de mes assemblages forestiers aléatoires avec la fragilité des transferts de mon binôme. Les différentes essences de bois récoltées sont certes, à première vue, cachées par le papier collé de Lucile, mais ma dernière étape de création sur chaque pièce est de révéler ces couleurs cachées.
Alors que ses images parlent d'un futur robotisé et domotique, mon approche personnelle est d'ôter tout ce surplus, ces superpositions, de gratter jusqu'à l'essence première de la matière. Une sorte de retour aux sources, à vrai-dire. Comme un banquier qui se met à l'agriculture vegane.
Quant aux petites bulles pop colorées, elles sont en totale contradiction avec l'imagerie dystopique de Lucile. Comme si des lueurs d'espoir pouvaient encore pointer le bout de leurs nez dans le paysage politique et culturel actuel. Car où que l'on aille, il y a toujours des avantages et des inconvénients relatifs. L'herbe peut sembler plus verte ailleurs, mais elle sèche aussi, peut-être pas au même moment.
La naïveté de mes compositions et leur aspect branlant contrecarrent  les personnages encadrés et frontaux de ma partenaire. Nos pièces semblent pouvoir s'effondrer à tout moment (ce qui est faux je vous rassure) ce qui ramène au côté éphémère de nos vies. Ce qui tombe se relève. L'art est mort, vive l'art !


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